Euphotic (ft. Dion)

euphotic

Dion Stratos Δ Valentin Pommier
Une heure trente du matin. Je regarde le dos de Mr Price disparaître dans la foule en direction des portes. Persuadé que je ne connais pas son prénom, il insiste pour que je l’appelle comme ça à chaque fois. Je le dis avec l’accent français. Manifestement, ça lui plait beaucoup. Personnellement, j’ai du mal avec lui. Ceux qui testent sans arrêts les limites sont épuisants. Heureusement, ce soir, il avait jeté son révolu sur l’Ambrosius. Aller en terre inconnue, ce n’est jamais désagréable. Ce n’est pas la première fois que je mets les pieds ici. A vrai dire, l’agence conseille souvent ce club, que ce soit en point de rendez-vous ou pour passer une soirée de reconnaissance. Dans le cas de Mr Price, ce n’est pas vraiment ça, on se connaît déjà – sinon je n’aurais pas accepté le voyage sur les sièges arrière de sa BM avant même qu’on arrive. Ce n’était pas très intéressant, le souvenir ne vaut pas la peine d’être enregistré et j’en garde juste une marque violette derrière la nuque, à peine cachée par la chemise qu’il m’a demandé de mettre pour l’occasion. (Plutôt le genre fine et pas boutonnée jusqu'en haut, même si, si ça n'avait tenu qu'à moi, je n'aurais pas mis ça en boite. J'ai chaud. Merci Mr. Price.) Peu importe. Tant que je suis payé, je m’en fiche un peu. Aah, ça me blase complètement tout ça. Alors quand je regarde l’heure, j’hésite. Assit au bar, je pèse le pour et le contre. Si je rentre et que je dors maintenant, un court sommeil avant les cours de demain (vive les cours de samedi matin, n’est-il pas) me fatiguera plus qu’autre chose. Mais si je ne dors pas, je sombrerai vers dix-sept heures. Le dilemme. Et puis je décide que finalement, je n’ai pas très envie de bouger. Maintenant que je n’ai plus les mains baladeuses de Mr Price sur ma taille ou mes jambes, je peux un peu regarder autour de moi. Je ne suis pas très boites de nuit, mais c’est vrai que celle-ci fait un peu exception. C’est sûr que je n’y rentrerais pas seul, je ne viendrais pas ici pour passer le temps, mais une fois qu’on y est ce n’est pas si mal. Ne serait-ce que l’ambiance. La musique est forte mais appréciable et les gens dansent, mais on est loin des atrocités des boites en chaîne qu’on peut trouver dans certains quartiers de Détroit. Pas que j’en ai une connaissance très étendue. Mais bon. Et les cocktails sont bons – c’est le moins que l’on puisse dire. Et les gens sont, comment dire… plus lâché ? Je regarde l’assemblée avec un regard à la fois admiratif et appréciateur. Puis je me retourne vers le barman pour commander un mojito. Peut-être un ou deux, et puis je rentre.
© GASMASK

Dionysus s’ennuyait, et pourtant la clientèle se portait à merveille et consommait joyeusement, mais personne n’avait retenu son attention ce soir. Le dieu détestait l’ennui. Ça le rendait grognon et désagréable, et ça, c’était mauvais pour le commerce. Refusant de finir sa soirée sur une note aussi déplaisante, le grec quitta son salon privé et se mêla pendant un temps à la masse de corps qui se mouvait de manière complètement désordonnée, et pourtant, Dion savait que leurs esprits étaient à l’unisson.

Un jour, tout ces gens se presseraient pour déposer des offrandes à ses pieds. Il entendait déjà leur litanie : Ô Bromius, Bromius, Bromius ! Le dieu se perdit dans sa rêverie quelques instants et c’est à peine s’il se rendit compte que ses pas le menaient au bar. Comme quoi son corps savait mieux que lui lorsqu’il avait besoin d’ingurgiter de l’alcool.

Dion s’enfila cul sec deux shots de vodka avant de passer derrière le comptoir. Cela l’amusait de jouer les barmans certains soirs. Une petite demi-heure passa ainsi, Dionysus servait ses cocktails, discutaient avec les plus bavards. Puis, durant un moment de répit, il remarqua enfin un jeune homme au visage étrangement familier, Dion était pourtant sûr de ne jamais l’avoir vu. Cependant, il savait d’instinct que le garçon, car ce n’était qu’un garçon pour lui, n’était pas tout à fait humain. Intéressant.

Le grec se glissa jusqu’à lui et repéra aussitôt son verre de mojito à moitié fini et lui remplit à nouveau. Le regardant droit dans les yeux, il ne passa pas par quatre chemins et lui demanda de but en blanc :

“Votre visage me dit quelque chose mais impossible d’y associer un nom…Ai-je déjà eu le plaisir de vous croiser auparavant ?”

[*roule sous une table* désolée d'avoir mit autant de temps, en plus c'est nul ;w;]

euphotic

Dion Stratos Δ Valentin Pommier
C’est paradoxal. La musique fait trembler les baffles derrière moi et insuffle son rythme à tous ces corps en mouvement, pourtant elle pourrait presque me bercer. C’est une transition parfaite pour un retour à la normalité. Je bois quelques gorgées sans me presser en savourant le goût de la menthe - je crois que c’est le meilleur mojito que j’ai jamais bu. Cela fait à peu près dix minutes que je suis là, à observer un peu ce qu’il se passe autour, quand je vois du coin de l’œil une silhouette se rapprocher. Pendant que je me replace en face en faisant pivoter le tabouret, mes yeux restent fixés sur les mains qui remplissent mon verre qui n’avait rien demandé. Je les regarde jusqu’à ce qu’à ce que les glaçons atteignent de nouveau le bord du verre. Puis mon regard se relève, et je peux enfin attribuer un visage au propriétaire de ces mains. C’est le barman. Qui d’autre, pour remplir un verre. Je le vois ouvrir la bouche, et pendant un quart de seconde je me dis qu’il va sûrement me demander de payer la conso que je n’ai pas commandée. J’ai tout faux. Un sourcil se hausse alors que je l’observe un instant. Je ne m’attendais pas vraiment à ça. Un nouveau mojito, et un « ai-je déjà eu le plaisir de vous croiser auparavant ? » Qu’est-ce que je dois en déduire ? En tout cas, ça me fait sourire, et je me penche légèrement en avant pour me faire entendre alors que je lui réponds. « Merci. » Pour le verre. « Et je ne crois pas, » dis-je en soutenant son regard. « Je pense que je me serais souvenu de vous, » j’ajoute ensuite en accentuant mon sourire. Et ce n’est pas faux du tout, il n’a pas un visage très commun, je m’en serais rappelé. Je ne pourrais pas donner de nom, mais il n’est pas typé comme les gens du coin. Avec son teint de peau, ses cheveux bouclés et sa mâchoire, je ne sais pas – d’Europe de l’est, peut-être ? Ou du sud ? Ça ne veut rien dire, Europe du sud. C’est triste, je connais mieux la géographie de la Lune que de la Terre. Bref. Il n’est sûrement pas d’ici. Dans ce cas, d’où vient-il ? « Je crois que c’est la première fois que je vous vois derrière ce bar, en fait. Après, je ne viens pas ici très souvent. » Ma main se pose sur le verre, que je ramène vers moi. « Et j’avais tort, c’est vraiment délicieux. Enfin, je n’ai rien goûté d’autre pour l’instant, mais bon. D’ailleurs, je vous dois combien ? » Je ne mens pas même si j’en rajoute un peu, parce que l’alcool n’est pas vraiment ce qui me fait me déplacer. Mais bon, autant être sympa avec le personnel des lieux. C’est mieux pour le business.
© GASMASK

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