Solstice d'hiver 1989
-Hope ? Hope ? Ma puce?
-Guuuuyaaaaaa !!!
-Elle est belle hein...
-Oui. Elle a ton troisième œil.
-Mais elle tient ses autres yeux de toi. De jolis yeux vairons. J'espère qu'ils ne s'assombriront pas avec l'âge...
Penchés au dessus de son berceaux, deux grosses têtes humaine au troisième œil fermé la regardait avec un air con. Souriants, babas, elle leur babillait à la figure depuis deux minutes (ce qui lui semblait être une éternité) sans leur tirer une autre réaction que deux grimaces démesurément heureuses. Elle était née depuis quelques heures et, déjà, ils étaient dingues d'elle. Peut être, qui sait, qu'à vingt ans, elle aurait le monde à ses pieds ?
La porte s'ouvrit derrière les deux géants et un autre géants, avec des poches de nourritures semblable à celle de... De Maman. Oui, c'était le nom de son colosse nourrisseur. L'énorme encéphale dodelina au dessus de son lit et une immense pince prolongée de bâtons noueux vint la tiré de son séant. Elle râla, insultant la créature à la peau rêche dans son langage gémissant et incertain, s'attendant à la même expression d'illuminé que celle que lui offrait ses géniteurs. Elle fut déçu. La chose lui offrit un sourire désabusé, approchant son oreille de son orifice à manger et faire le son, avant de lui murmurer à l'oreille:
-Si eux ne te comprennent pas, moi si. Respecte donc la 'chose' que je suis et appelle moi désormais grand mère.
Hope ouvrit de grands yeux étonnés et se mit à pleurer. Elle n'aurait pas le monde à ses pieds à vingts ans. Il existait bien plus fort qu'elle.
La vie, quand on a six ans et qu'on fait pousser des fleurs
-Mon papa à moi, c'est un magicien sans pouvoir. Et il a pas de troisième œil, contrairement à ma maman et à moi et, même si papy et mamie sont des sorcier, mon papa il doit tout faire comme les humains normaux. Mais c'est pas grave, parce qu'il pratique des magies encore plus puissante comme la poésie et l'amour. C'est ma maman qui le dit.
Abigaïl regardait Hope avec de grand yeux. Hope était magicienne... C'est pour ça qu'elle avait un œil au milieu du front.... Tout prenait un sens. La dernière fois qu'elle en avait parlé à la maîtresse, l'adulte avait rit et lui avait dit que Hope était normale et qu'elle n'avait que deux yeux, comme tout le monde. Devant l'insistance de la petite, elle avait fini par l'encourager à aller demander directement à l’intéressée le pourquoi du comment. Ce qu'elle avait fait. Et la réponse l'avait laissé sans voix.
-La maîtresse, elle m'a dit que je rêvais. Ma je savais bien que je rêvait pas ! Je le savais !
-Oui, mais faut pas lui dire.... Elle le voit pas, elle, parce qu'elle y croit pas. Et si tu insiste, les gens vont penser que tu malade dedans la tête.
Abigaïl hocha la tête. La plupart des adultes étaient bornés, sombres, sérieux et bêtes. Et il n'écoutaient pas les enfants. Il fallait donc garder le secret.
-Viens, s’enthousiasma Hope, je vais te montrer quelque chose !
Elle prit sa nouvelle copine par le bras, l'entrainant un peu à l'écart dans un coin de la cours. Elle arracha de la mousse qui s'était accrochée au muret et l'avait enfermée au creux de ses mains avant de chanter une chansonnette d'enfant sans grand sens. Puis, elle rouvrit les mains, présentant à son amie une mousse pleine de petites fleurs blanches qui sentaient bon le sucre.
-Whohaaaaaaaaaaaa !!! Géant !!!! Et... Comment tu as appris ? Apprends moi ! Apprends moi !
-Je sais pas... Je savais faire dés le départ... Depuis que je suis née.. Je peux pas t'apprendre. Désolée..
La petite fronça les sourcils, lâchant un 'Puisque c'est comme ça, t'es plus ma copine !' avant de partir en traînant les pieds pour bien montrer son mécontentement laissant Hope tout seule avec ses fleurs et son désespoir. Avant de revenir, deux minute plus tard, lui prenant la main avec timidité.
-Dis, heu... Même si t'es plus ma copine, on peut quand même se mettre à côté pour la matinée ?
-Même si t'es plus ma copine, oui !
-Chuis vraiment plus ta copine ?
-Mais non, patate. On est amies pour la vie !
Onze ans et un déménagement
-T'as des nouvelles d'Abigaïl ?
-Non. Pas depuis la rentrée.
-Ah. C'est dommage. Vous vous entendiez bien.
-Ca me rend un peu triste...
-Je comprends ma puce. Donne moi les assiettes s'il te plait.
Hope se leva, marcha d'un pas traînant vers la placard de la cuisine, amenant à Aaron, son père, les piles d'assiettes pour qu'il les mette dans le carton. Elle aimait bien leur appartement, elle comprenait pas pourquoi ils en partaient.
-Dis, papa. Pourquoi on s'en va ?
-C'est l'appartement de maman quand elle était petite et de tes grands parents avant elle. Elle a toujours vécu là, notamment à une poque où les afro-américains n'avaient pas une vie facile. Elle a besoin de faire son deuil de cette époque et de l'héritage que représente cet endroit.
-Oui, mais dés que je dis que je vais à Detroit, les gens me regardent avec des grands yeux. Ils disent que la ville est morte. Comment une ville peut elle être morte ? Et pourquoi on va là bas ?
-La ville n'est pas vraiment en bon état, c'est vrai. Mais on va rejoindre tes grands mères qui se sont installées là bas et on va même habiter dans une maison ! De plus, là bas, il y a une grande communauté monstrueuse. Tu auras des copains comme toi et ta maman pourra pratiquer la magie sans que cela ne pose de problème. D'ailleurs, ta grand mère maternelle veut te transmettre son savoir. Ca sera plus simple si vous êtes près l'une de l'autre.
Elle hocha la tête. Elle avait vu des photos de la maison. C'était une jolie maison, bien décorée, comme il y en avait dans les séries. Maman disait qu'il y aurait des travaux à faire mais que grand mère et mamie s'en occuperait avec leur club de sorcellerie. Elle avait retrouvé d'autres sorcières de Salem, ou au moins certaines de leurs descendante, et elle procéderaient à de la rénovation magique tant qu'il faudrait. Ils auraient un chez eux confortable, avec une grande cuisine pour faire plein de petits plats. L'idée lui plaisait, mais quitte à utiliser la magie, ne pouvaient-ils pas avoir une maison semblable en plein centre ville ? C'aurait été plus simple.
-Aller, debout, on va charger le camion. Ah, et ferme ton œil. Y'a un petit jeune qui a aperçu celui de ta mère, j'ai cru qu'il faisait un arrêt cardiaque.
Elle rit d'un rire d'enfant avant de saisir un petit carton et de partir à la suite de son papa. Faire le deuil d'un endroit... Qu'elle drôle d'idée.
Elle s'avança dans le corridor, saluant les déménageurs, ne résistant pas très longtemps avant d'ouvrir son œil. C'était tellement tentant et elle se sentait aveugle quand elle le fermait. D'ailleurs, en remontant, elle ferait du café. Le gros monsieur, là bas, il avait envie de café.
Quand on a quinze ans et qu'on est entouré d'idiots
Hope ne s'était jamais sentie à l'étroit depuis qu'elle avait changé de ville. Elle s'y était rapidement faîte. C'était devenu chez elle.
Mais voilà. Là, c'était trop petit. Trop petit parce qu'elle La croisait tout le temps. Avec ses cheveux décolorés, son look de dalleuse du dimanche, son air désinvolte... Son piercing à l'arcade... Elle ne la connaissait pas. Elle n'était pas amoureuse. Juste... Qu'est ce qu'elle était belle... Tendance plus que belle d'ailleurs.
Elle n'était pas dans sa classe. Elle tait plus âgée, mais dés qu'elle la croisait dans un couloir, son regard était aimanté. Tout son regard. Y compris son troisième œil. Et ce qu'elle voyait lui faisait mal.
La majorité des gens aimaient les gens du sexe opposé. Et ceux qui étaient comme elle... Elle avait essayé de leur parler. Plusieurs avaient nié en bloc. D'autres lui avait intimé le silence. A tel point qu'elle même s'était tue. Et que La voir faisait monter les larmes à ses yeux. Pourtant, quand les garçons parlaient des filles, elle se sentait concernée, elle les comprenait. Le regard traînant, le cœur et l'imagination partant au galop d'un commun accord...
-Faut pas que tu gardes ça pour toi. Peut être pas lui dire à elle alors que tu ne la connais pas. Mais dehors, les gens ne te jugeront pas.
Hope fit un bon sur le banc, retenant un cri. Un jeune cerf humanoïde la regardait avec amitié.
-C'est triste de ne pas se laisser aimer.
-... Vous êtes ?
-Oh ! Pardon, dit-il en lui tendant la main, Je suis l'esprit de l'arbre là bas.
Elle sera sa main, rencontrant des regards plus que circonspects.
-Ils ne me voient pas. En grandissant, les humains voient de moins en moins les choses. Comme pour ton troisième œil. S'ils croyaient aux esprits, ils me verraient. Comme le jeune homme là bas, qui est devenu blême. Fait lui coucou ! COUCOU !!!!!
Elle fit coucou de la main, la mine penaude. Le pauvre, il semblait très inquiet de la présence de cet esprit pourtant gentil.
-Vous autres, vous vous prenez trop la tête (rapport à l'amour), comme si au final, tout ça importait. Et le pire, c'est que ça fini par importer. Bref. Je te conseil d'en parler à ta grand mère maternelle. De ça et de comment elle a eu Sky, comment elle a eu ta maman.
-Pourquoi ?
-Parles lui en. Tu verras bien. Bon, sur ce, je dois aller.
Et il disparu. Au loin, dans la cours, Elle passa. Hope sourit.
Elle se dirigea en direction du jeune homme qui sursauta en la voyant approcher, fixant intensément son troisième œil. Elle lui tendi la main.
-Je m'appelle Hope. Et toi ?
Il lui sera la main timidement.
-Je suis Joachim...
-Enchantée Joachim. Toi et moi, je sens qu'on va avoir des trucs à se dire.
Quand les études sont familiales, après 18 ans
Hope venait d'arriver près du champs. Elle avait déposé ses affaires à l'abris de la bruine avant de rejoindre sa grand mère qui, pliée en deux, travaillait déjà. Elle enleva ses chaussures, retroussant son pantalon pour aller patauger dans la boue avec elle. C'était la période de récolte des bulbe de torpeur et il ne fallait surtout pas la rater ! A un ou deux jours près et tout était foutu. La vieille femme l’accueilli, un sourire aux lèvres, lui indiquant par où commencer. Elle se mit au travail.
Après plusieurs heures de récolte, alors que la pause pointait à l'horizon, Hope se redressa.
-Dis, Mamie... Je viens d'y repenser, mais quand je me suis dis pour la première fois que j'aimais les femmes, j'ai croisé un esprit qui m'a dis de t'en parler. Pourquoi ?
La blanche se redressa, faisant craquer son dos. Elle inspira un grand coup avant de se raviser et de lancer son menton en direction de la serre.
-Aide moi à porter la récolte là bas, je te raconte ça sur le chemin. Prends ce sceau, je prends celui ci... Voilà. Alors... Humpf, saleté de sceau. Bref. j'aime les femmes. Plus que ça, je leur porte un amour exclusif. Les hommes ne m'ont jamais attirés d'une quelconque manière que ce soit. Cependant... J'ai toujours voulu un enfant. Et cette envie s'est renforcé lorsque j'ai rencontrée Flora. Je l'ai rencontrée lors d'un festival de musique, dans les années soixante. Je suis tombé très amoureuse. (pose le sceau sur la table ma puce). Et elle aussi. Elle avait un goût pour l'ésotérisme assez prononcé, j'étais intrigante et belle, elle était fraîche et magnifique, je lui faisais pousser des fleurs directement dans les cheveux... C'est comme ça que je l'ai séduite. En lui faisant pousser des tournesols dans les cheveux. Ca a été l'amour de ma vie. Je voulais un enfants avec elle, pour elle, qui lui ressemble... Alors j'ai appelé les esprits. Ils m'ont répondu, les esprits féconds sont généralement bienveillants, et ils m'on accordé une semence compatible avec la mienne qui serait issue de ma bien aimée. C'est comme cela qu'a été conçu ta maman. Malheureusement, sa famille a appris qu'on formait un couple avant que je n'ai eu le temps de lui dire que notre opération avait fonctionné et sa mère a essayé de l'envoyé en camp de redressement comme il y en a toujours (fort heureusement peu). Elle les a devancé et est partie en Europe où elle a refait sa vie. On s'est perdues de vue. J'ai eu des amours depuis, mais sans plus que ça. J'ai appelé ta maman comme elle aurait voulu qu'on l'appelle. Ca te va comme réponse ?
Elle hocha la tête, un peu abasourdie, commençant à trier les bulbes par taille et par couleur.
-A part ça, comment va Joachim ? Toujours sur son projet d'encyclopédie du fantastique du réel ?
-Oui, il est à fond dedans. Je lui ai donné accès à la bibliothèque de la maison, il est comme un fou.
-Tant mieux. Et ton papa ? Ca va avec Ross et Isaac ?
Elle haussa les épaules. Les deux frères triplés de son père étaient de plus en plus pro-monstre. Isaac avait même affirmé que les humains ne devraient être qu'une réserve de sang et d'organe nécessaires aux créatures magiques... Les disputes familiales étaient de plus en plus fréquentes et, une fois, ils en étaient venus aux mains. Et à la magie. l'un d'eux avait osé lancer un sort contre Aaron. Sky était alors entrée dans une colère noire et avait ligué contre eux la majorités des esprits présents dans la pièce à ce moment là. Elle pouvait être très impressionnante quand elle s'y mettait vraiment. Et personne ne touchait à son père. Depuis, ses oncles n'étaient plus les bienvenus.
-Comme lors d'un conflit familial chez des sorciers. Ca pourrait être pire.
L'aînée rit. Oui, ils en étaient pas encore venus aux malédictions, c'était bon signe.
-Ayai !!! J'ai fini. Ca te vas comme tri ?
-Oui, parfaitement. Tu es libre.
-Merciiiii !!!
Hope ramassa les outils, les rangea comme il faut. Puis elle se dirigea vers la sortie.
-Ma puce !
Elle stoppa sa course, se retournant.
-Prends une perle de sève et offre la lui. Je suis sure que ça lui plaira, a ta madame du moment.
Hope rit. Il n'y avait rien a faire. Elle allait sur la vingtaine et pourtant le monde ne daignait pas s'étendre à ses pieds. Il existait bien plus fort qu'elle...
Aujourd'hui
Hope marchait pied nus sur la pelouse qui recouvrait le sol de son appartement. Au dessus d'elle, le toit de verre s'ouvrait sur le ciel nocturne, lui offrant une magnifique vue du ciel d'hiver coloré par les lumières de la ville. L'entièreté du jardin qu'était son logement semblait dormir.
Elle alla s'asseoir sur les coussins qui trônaient sur le sol et son chat vint danser autours de ses jambes. Elle lui gratta la tête distraitement. Les rénovations de son magasin étaient enfin finies. elle allait enfin pouvoir travailler et rembourser son appartement à ses parents. Non pas que cet ancien atelier ai vraiment coûté cher mais sa famille avait passé tellement de temps en sortilège, enchantement, invocation afin de faire de ce lieu un paradis fleuris qu'elle leur devait bien ça.
Son portable vibra. Waverly.
'Merci pour les fleurs. A plus tard autours d'un café ?'
Elle sourit.
-Tu sais quoi Mangrove ? Je crois que j'ai un rencard.
Elle sourit, se laissant tomber dans les coussins.
Là, maintenant, tout allait tellement bien. Une jolie femme voulait la revoir, elle était lancée... Elle ferma les yeux et s'endormi.