Description du caractère : S’il pouvait choisir, Samaël naitrait prince. Il en a l’étoffe, il ne lui manque que la couronne. Fier le danseur qui se sait pourvu d’une grâce naturelle, pour ne pas dire surnaturelle, et qui de loin surclasse les autres. Les autres… Qu’il ne peut s’empêcher de regarder de haut, ou de biais. Ces autres qui ne sont que divertissements, distractions, le temps de se reposer un peu de soi. Samaël aime enfiler les masques sur les théâtres d’autres vies. Mais le jeu n’est que temporaire, passager, le temps, seulement, de satisfaire sa nature, d’assouvir sa faim, peu importe laquelle. Car Samaël est un estomac qui n’a de préférence pour l’homme ou la femme et qui ne connait jamais l’entière satiété.
Comme sa solitude lui est parfois, bien malgré lui, un peu pesante, il se soumettra à la valse des amitiés, se laissera peut-être même prendre au jeu, mais c’est sans avertir qu’il peut du tac-au-tac tourner les talons, prendre son ombre et s’en draper, disparaître.
Puisque l’équilibre est son maître, rien que pour le défier, il a fait du déséquilibre son partenaire de prédilection. Aussi Samaël tend-il souvent aux extrêmes, quels qu’ils soient. S’il danse, il le fait avec un abandon total. S’il hait, il hait en toute absence d’esprit. S’il rit, il rit avec l’enthousiasme naïf d’un enfant. Quant à l’amour, il n’a jamais sincèrement aimé et s’en croit incapable. Il redoute la faiblesse qui vient avec.
Ses élèves le diront extrêmement exigeant et froid, mais somme toute efficace, surtout pour ceux qui laissent entrevoir un certain talent. Les chorégraphes le jugeront entièrement dévoué à son art, possesseur d’un talent de l’ordre du prodige et maître d’une discipline qui le sert bien. Certains désapprouveront sa curiosité pour d’autres danses que le ballet.
Mais Samaël fait ce qu’il veut.

Aimez-vous votre condition de monstre ? Il vit avec sans trop s’arrêter à se demander si sa condition lui plaît ou pas. Samaël danse. C’est tout ce qu’il sait faire, dira-t-il, aussi est-ce tout ce qu’il fera. Du moins prétendra de faire. Car plus le temps passe et les morts entraînent les vies, moins Samaël s’identifie à quoi que ce soit, ni monstre ni homme… Qu’une ombre qui prend vie sous les projecteurs.

Que pensez-vous des humains ? Peu de choses. Sinon qu’ils sont terriblement fragiles et éphémères, qu’ils mènent des vies sans éclats. Des bêtes qui se tiennent sur deux pattes. Belles bêtes, cela dit… Du moins certaines, certains… Friand de bonne chair, Samaël est une fine gueule qui ne se repaît, sous les couvertures, que des plus belles figures.

Êtes-vous bien intégré à la société ? Aux premiers abords, très bien intégré. Tout juste arrivé de Montréal, le plus jeune premier danseur des Grands Ballets Canadiens a intégré le conservatoire en invité, mais également dans le but d’ajouter des cordes à son arc, notamment en y acquérant une formation en danse contemporaine. Peu intéressé à enseigner à quiconque, il se prête tout de même à l’exercice – temporairement – afin de satisfaire aux exigences requises par la très généreuse bourse dont il fut récemment le récipiendaire. Il demeure, cela étant dit, très à l’affût des opportunités qui pourraient faire de lui la célébrité qu’il compte bien devenir. Mais dans sa vie de tous les jours, Samaël éprouve quelques peines à nouer des liens durables avec ses collègues. L’intégration n’est réussie, dans les faits, qu’en surface.

Souhaitez-vous dévoiler votre véritable nature au reste du monde ? S’il le faut. Qui sait ce qu’il en sera lorsqu’il sera connu de tous? Peut-être même que le reste du monde saura mieux l’apprécier que lui-même, cette « véritable nature ».

Quelles sont vos activités favorites ? Avez vous une passion ? La danse classique, de toute évidence. Sinon, la danse au sens large. Autant que possible, Samaël veut faire de son corps un instrument de toutes les musiques. S’il aime tant se mouvoir, dessiner une parole de ses gestes, c’est sans doute qu’il ne sait, autrement, que maladroitement ou qu’à demie s’exprimer. En dehors de ses innombrables répétitions, il prétend aimer les sorties mondaines, mais en vérité, il s’endort immanquablement devant un opéra et rêvasse constamment au théâtre. Ses quelques ennuis solitaires le mèneront plutôt devant son téléviseur ou au cinéma où il se gavera de films d’horreurs en riant à en pleurer, plié en deux sur son siège.

Décrivez l'endroit où vous passez le plus de temps (une pièce chez vous, au travail, un endroit à l'extérieur, etc). De loin, c’est dans la salle de répétition que Samaël est le plus à son aise, que ce soit pour enseigner, suivre des classes ou, mieux, beaucoup mieux, laisser libre cours à son inspiration. Ainsi c’est avec son reflet, qu’il observe froidement, dont il décortique les postures plus qu’il n’en apprécie la grâce ou la beauté, qu’il passe le plus clair de son temps.

Quel est le bien auquel vous tenez le plus ? Pourquoi lui accordez-vous tant de valeur ? De toutes les babioles sauvées de son enfance, il prend particulièrement soin d’une petite image de la Vierge Marie pas plus grande que la paume de sa main. Pliée, dépliée, les coins en sont usés, les couleurs défraichies, mais qu’importe, car la Vierge y prie toujours, infatigable, pieusement inclinée sur ses mains jointes. En secret, Samaël lui parle, tantôt sous le ton de la confidence, tantôt accusateur. C’est qu’il voit un peu en cette image le visage d’une mère jamais connue.

Qu'est-ce qui vous met le plus en colère ? Être ignoré, réprimandé, repoussé dans l’ombre. Samaël aime qu’on lui accorde l’attention et l’assentiment qu’il estime mériter.

Quelle est votre plus grande peur ? Vieillir. D’où une sérieuse tendance au suicide. Samaël est pétrifié à l’idée de voir son corps, sa jeunesse, plus que tout sa danse, se faner.

Que faites-vous pour pallier au stress ? Improviser sur Satie ou regarder des films d’horreur en buvant du lait au sirop d’érable.

Quelle est la routine d'un jour normal pour vous ? Comment vous sentez-vous si cette routine est rompue ? Au lever, Samaël déjeune, puis se rend au conservatoire afin de répéter, seul. Dépendant des jours, il assiste par la suite à des cours de danse, ou encore, enseigne lui-même, tantôt à des enfants, à des adolescents, tantôt à de jeunes ou moins jeunes adultes. Avant de rentrer, il profite quelques heures de plus de la salle de répétition. Le soir, dépendant de ses fréquentations du moment, il sort en ville, rentre tout simplement chez lui ou traîne un peu plus longtemps devant les miroirs. Il s’avère très peu original quand vient le temps d’improviser en dehors du studio de danse. Souple, sa routine se plie plutôt aisément aux impromptus de la vie. Si par exemple Samaël ne pouvait avoir accès au conservatoire, il demeurerait probablement chez lui, à faire des étirements devant le téléviseur ou en écoutant de la musique.

Vous aimez-vous ? (question d'amour propre) Oui, mais de façon très superficielle, sans chercher à voir par-delà le talent et la beauté.

Listez trois choses  dans lesquelles vous vous considérez bon, et trois choses dans lesquelles vous ne l’êtes pas.  
Si ce n’est de la danse, Samaël se sait doué…
À faire des chignons, peu importe le type de cheveux en autant qu’ils aient une certaine longueur (et encore…).
À préparer les petits déjeuners.
À flatter les chats. Les chats l’adorent, le vénèrent, le veulent.

Pour ce qui est du côté obscur de la Force, Samaël est conscient qu’il…
Manque de culture et de connaissances générales.
Est souvent un peu lent à comprendre.
Pense beaucoup trop à tout ce qui se joue sous la ceinture.

Quelque chose à rajouter ? Grand amateur de musique, notamment classique, il s’en fait un péché mignon et garde pour lui ce penchant, craignant incarner une sorte de cliché. Allez savoir pourquoi.

Physionomie : La légende veut que le démon venu se jouer des hommes ait entre ses mèches sombres deux cornes, au bas de son dos une queue et sur son visage des iris rouges pour trahir son appartenance aux feux éternels. Mais il y a si longtemps que Samaël ne sait plus et n’a que faire des racines de son Histoire que des cornes il ne reste plus que deux taches noires camouflées dans ses cheveux, de la queue une cicatrice au-dessus de la croupe et du regard des reflets ardents.
À même sa peau blême parsemée de grains de beauté (menus détails qu’il déteste), son art, sa danse, s’inscrit dans un muscle finement ouvragé. Il va s’en dire que Samaël est comme qui dirait « bien fait ». Plus fort que peut le laisser croire sa fine dégaine, et de grandeur moyenne (ne fait pas tout à fait six pieds), sa posture et son évidente aisance à se mouvoir, à s’habiter, trahissent sa vocation.
L’apparente négligence qui caractérise sa coiffure est en vérité toute réfléchie. Il aime sa frange généreuse et le reste distribué au gré d’un faux hasard au pas de la nuque. Il en va de même pour ses vêtements, qu’il choisit avec une toute fausse indifférence. Samaël adopte collants et chaussons pour danser, mais préfère les chemises et chandails amples en dehors du studio. Et griffés, préférablement.

Une fois de plus, tu nais dans les pleurs et le sang.
Une fois de plus, tu t’extirpes du ventre froid de ta mère.
D’être né, encore, tu hurles. Le bercement mécanique des bras de l’infirmière ne saura pas te consoler, Samaël.
C’est comme ça qu’elle t’appelait. Elle, ta mère. Elle, la morte qui leur a échappé. Le médecin a toujours du mal à comprendre comment c’est possible qu’aujourd’hui encore… Qu’aujourd’hui encore cette satanée mort qui rôde dans les couloirs de l’hôpital ait la faux suffisamment aiguisée pour enlever sa mère à un enfant à peine né.

Dans la pouponnière, tu pleures et tous les autres pleurent avec toi. Petites choses encore laides, vous faites pitié.
Mais soudain, de n’être plus le seul à t’époumoner, tu t’interromps. Tes poings minuscules serrés sous le linge immaculé qui t’habille, tu écoutes un moment, puis t’endort paisiblement au cœur du vacarme.
Peut-être sais-tu, petit diable, que ta première danse ne saura tarder. Sans mère ni père, sans proche pour te recueillir, la mort de ta génitrice fera bientôt des heureux.

-« Samaël »?
-C’est le prénom qu’elle lui destinait, oui.
Celle qui te tient dans ses bras aurait préféré n’avoir jamais demandé. Samaël… Il lui faudra du temps pour ne pas voir le visage de Satan, mais bien le tien, en le prononçant. Car il est trop tard pour reculer. Comme les Lamoureux sont de bons chrétiens, ils choisiront d’honorer la mémoire de ta mère en respectant cette ultime volonté. Pauvre femme. Après tout, elle fait d’eux d’heureux parents.

Samaël Lamoureux, c’est donc ainsi que l’on te baptise. Toi, vociférant dans les bras du prêtre devant l’autel. Au contact de l’eau bénite sur ton front, ta fureur est telle que tu en manques de souffle et prend une teinte bleutée. Paniquée, ta mère prie l’homme de Dieu de couper court à la cérémonie.

Les Lamoureux prient avant chaque repas et se rendent à l’église tous les dimanches. Ils y retrouvent leurs couples d’amis et leurs enfants, mais eux aussi ont un bambin à exhiber, à présent. Samaël, tu es leur bonheur et auras tôt fait de t’en rendre compte.

Tes crises dominicales te sont toutes pardonnées. Tes caprices d’enfant gavé d’amour et d’attention te sont pour la plupart accordés. Et ton talent, Samaël, ton talent reconnu à peine quelques années après ta naissance t’élève au rang d’enfant prodige. Encore et encore et encore, dans toutes leurs prières, les Lamoureux remercient Dieu de t’avoir déposé sur leur chemin.

Le ballet, le ballet… C’est bien beau le ballet, mais ton père, conservateur du bout de ses chaussures vernies à sa frange léchée sur le côté, s’inquiète des conséquences « néfastes » que tout ce temps passé principalement avec des filles, à porter collants et chaussons, pourrait avoir sur toi. Heureusement, à dix ans, tu te sais déjà un caractère à faire bredouiller tes enseignants. Ton père a droit à semblable traitement. Aussi, comme elle est ta plus grande fan, ta mère ose même prendre parti et défendre tes intérêts.

Ce n’est qu’à l’adolescence que tu te libères, partiellement, de tes parents adoptifs. C’est moi qui t’ai trouvé. Dès ton entrée sur scène, à ta démarche contrôlée, déterminée et belle, oui, belle, j’ai su que je t’avais sous mes yeux, Beau danseur, et que t’aimer me serait le plus doux des supplices.

J’ai fait de toi le Premier. Le mien et celui de ma compagnie. Je t’ai révélé sous les projecteurs, me suis enivré de chaque heure passée à maquiller mon désir d’exigences.
Jusqu’à ce que tu m’échappes.

Où logez/vivez-vous en ce moment ? Pourquoi avoir choisi cet endroit ? En résidence au conservatoire, Samaël y loge dans un petit quoique charmant loft. Il ne l’a pas choisi, s’est contenté de recevoir la bourse et les privilèges qui venaient avec, principalement dans le but de tenter sa chance aux États-Unis. Là, espère-t-il, l’on saura reconnaître l’étoile qu’il est.

Avez-vous un but que vous souhaitez atteindre à tout prix ? Si oui, où en êtes-vous  ?  Devenir célèbre. Après son passage remarqué dans les Grands Ballets, on s’est surtout intéressé à lui pour son talent, mais aussi beaucoup, et trop, à son avis, pour son jeune âge. Samaël aspire à la gloire, à la reconnaissance, qu’il marque l’histoire de la danse et pour ce faire, il estime qu’il doit non seulement devenir le plus grand danseur de ballet, mais le plus grand danseur tout court. Il prend le pari d’être le seul capable d’y parvenir de son vivant.